Pervenche Berès (S&D). – Madame la Présidente, Messieurs les Commissaires, je veux d’abord saluer le travail des trois rapporteurs des deux commissions saisies, qui est absolument remarquable.
S’agissant du fonctionnement de la troïka, je regrette avec force que la méthode communautaire ait été totalement ignorée au profit d’un monstre froid technocratique à trois têtes dépourvu de toute légitimité démocratique, si ce n’est un mandat délivré dans le plus grand des secrets, à huis clos, par un Eurogroupe présidé d’abord par Jean-Claude Juncker, pour trois des mandats de la troïka, puis par M. Dijsselbloem.
Le bilan de la troïka est accablant et des conflits ouverts ont rapidement émergé entre ses trois composantes, notamment sur l’importance à accorder au coefficient multiplicateur associé à l’effet récessif des politiques d’austérité recommandées. Quel crédit apporter alors aux recommandations d’un attelage aussi baroque en termes d’expertise macroéconomique?
En l’espace de deux ans, les projections de la troïka ont été considérablement révisées, le niveau réel de la croissance était constamment surévalué, tandis que le nombre de chômeurs était systématiquement sous-évalué. Là encore, l’Organisation internationale du travail aurait sans doute permis de tirer la sonnette d’alarme sur les échecs prévisibles des mesures envisagées et aurait pu éviter un effondrement du marché de l’emploi dans les pays sous programme.
Je vous invite à prendre connaissance d’une étude que l’Institut Bruegel vient de mettre sur la table qui démontre que les perspectives qui étaient envisagées pour le Portugal en 2013 devaient conduire à un chômage de 13,5 %, alors qu’il était de 17,5 %. Quant à la Grèce, où un taux de 14 % était prévu, on en est à 27 %, sans compter la mobilité forcée et l’exode des cerveaux systématiquement observé.
Je note par ailleurs qu’alors qu’une des règles d’or rappelée par tous au niveau de l’Union européenne, qui consiste non seulement à plaider en faveur d’une stratégie d’investissement intelligent, mais aussi en faveur du dialogue social, a été systématiquement bafouée dans les pays de la troïka et que l’Union européenne elle-même a été condamnée pour la première fois par l’OIT pour non-respect, en Grèce, des conventions collectives et donc des conventions de base de cette organisation, qui fondent le socle du dialogue social et de notre modèle social.