Strasbourg, le 23 octobre 2007
Rapports Belohorska, Breyer, Klass / Pesticides
Saisi en première lecture de deux projets législatifs relatifs à l’autorisation et à l’utilisation des pesticides, le Parlement européen s’est accordé sur une réduction de l’utilisation de pesticides, rejetant toutefois tout objectif chiffré. Selon les socialistes français, ce résultat est insuffisant au regard des objectifs de santé publique et de protection de l’environnement. De manière générale, la droite au Parlement européen fait obstacle à l’adoption des mesures à la hauteur des constats faits.
Utilisés pour protéger les végétaux contre diverses maladies et parasites, les pesticides ont considérablement transformé la nature même de l’agriculture européenne. Pourtant, les pesticides sont fréquemment mis en cause en raison de leur impact néfaste sur la santé et l’environnement.
En dépit d’une législation déjà existante, ils sont présents en quantités excessives dans les sols, l’air et l’eau ainsi que dans notre alimentation. Comme le rappelle Bernadette Bourzai, vice-présidente de la commission agriculture et développement rural : « Il s’agit d’une pollution diffuse difficile à cerner car elle résulte des ruissellements, des pertes directes dans le sol, dans l’air lors des pulvérisations aériennes, du lessivage des plantes par les pluies, d’une pollution persistante dans le temps et susceptible de se propager sur des kilomètres. » Une étude récente estime par exemple qu’en France, 90% des rivières et 50% des nappes phréatiques sont contaminées.
« La situation dramatique rencontrée actuellement en Outre-mer suite à l’utilisation massive durant plusieurs années de substances telles que le chlordécone montre avec acuité les dégâts écologiques mais également sanitaires et économiques qu’une utilisation non maîtrisée de substances chimiques put entraîner« , souligne l’eurodéputée socialiste Catherine Néris.
Face à ce constat, l’Union européenne a décidé de modifier sa législation, en encourageant l’utilisation durable des pesticides et en améliorant les procédures d’autorisation de ces produits.
« Il existe de fortes disparités entre les Etats membres tant dans leurs pratiques que dans l’approche politique, ce qui conduit à des compromis favorisant la subsidiarité« , estime Anne Ferreira, responsable du dossier pour les socialistes français en commission parlementaire de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire. « Il ne faut pas pour autant que nous soyons dupés par une certaine flexibilité qui serait en fait un prétexte à un moins-disant environnemental et sanitaire et qui ferait une interprétation a minima de la volonté citoyenne« , prévient l’eurodéputée socialiste française. Anne Ferreira estime que la subsidiarité, pour avoir du sens, doit servir à une réflexion plus globale sur les questions agricoles et environnementales en Europe.
« Il est nécessaire avant tout d’intensifier la recherche et le transfert de technologie et associer toutes les parties prenantes (agriculteurs, chercheurs, ONG, professionnels de la santé et industries agro alimentaires) et mener des travaux de fond dans chaque territoire afin qu’ils définissent ensemble de meilleures pratiques et des alternatives non chimiques adaptées au sol, au climat et aux cultures. »
Ce vote du Parlement européen a permis par ailleurs de soutenir les méthodes de substitution des pesticides par des produits plus sûrs et moins toxiques. Mais sur le point des méthodes de lutte intégrée et alternatives en matière agricole, le vote n’est pas à la hauteur des défis posés, une majorité du Parlement européen a rejeté que les mesures de lutte intégrée contre les organismes nuisibles soient obligatoires.
Enfin, le Parlement européen a voté la création de « zones tampon » le long des cours d’eau où l’utilisation des pesticides est interdite, sans toutefois déterminer la distance minimale à respecter ; il a restreint les conditions de pulvérisation par avion et l’utilisation des pesticides dans les lieux publics, accueillant notamment des personnes âgées, des malades et des enfants.
« C’est un résultat en demie teinte, laissant peu de place aux alternatives aux pesticides. Dans le cadre du « Grenelle de l’environnement« , la France a la possibilité de jouer un rôle de premier plan en matière de réduction de l’utilisation des pesticides et de leurs risques sanitaires et environnementaux. Qu’elle saisisse cette occasion assez unique d’intensifier ses efforts pour une meilleure utilisation des pesticides et pour le développement des méthodes agricoles alternatives« , insiste Anne Ferreira.