La semaine dernière, le patron d’un groupe de transport routier belge a été placé en détention préventive dans le cadre d’une vaste enquête sur le dumping social. La raison ? Son entreprise, le Group Jost, est accusée d’avoir employé et exploité des chauffeurs d’Europe de l’Est dans des conditions sordides et d’avoir fraudé la sécurité sociale pour plus de 50 millions d’euros. « Organisation criminelle », « traite d’être humains », « blanchiment », « faux et usage de faux social » et « escroquerie en droit pénal social », « défaut de paiement des salaires », voilà pour les chefs d’inculpation.
Quel meilleur exemple pour démontrer les lacunes de la législation européenne actuelle ? Car, pour un abus identifié, combien de fraudes persistent ? C’est pourquoi, alors que la Commission européenne s’apprête à dévoiler son paquet « transport routier » qui réformera en profondeur le cadre règlementaire européen (accès à la profession, temps de repos, cabotage, application de la directive travailleurs détachés, tachygraphe, etc.) du secteur pour les 20 prochaines années, les eurodéputés socialistes et radicaux mènent la bataille contre la concurrence déloyale et l’exploitation des chauffeurs routiers avec un fil conducteur : la qualité de vie des conducteurs routiers. Le temps du « salaire de la peur » des forçats de la route doit appartenir au passé !
La résolution sur les transports routiers, adoptée aujourd’hui, a pour objectif d’influencer la Commission européenne dans la dernière ligne droite de la préparation de ces textes. Nous nous félicitons d’avoir – à ce stade – remporté plusieurs victoires. En effet, le Parlement européen s’oppose clairement aujourd’hui à toute libéralisation accrue du secteur des transports routiers et du cabotage, à la flexibilisation des temps de repos. Il condamne sans ambiguïté la mise en concurrence des modèles sociaux et demande une lutte sans merci contre les fraudes, notamment pour éradiquer les sociétés boîtes aux lettres D’autres propositions concrètes ont également été retenues : mise en service du tachygraphe intelligent, application de la directive travailleurs détachés, ou encore renforcement des critères d’établissement pour lutter contre les sociétés boîtes aux lettres… Avec ces mesures, nous pouvons, si nous le voulons, mettre un terme à la dégradation continue des conditions de travail dans le transport routier et garantir le respect d’un principe élémentaire du Pilier social européen : à travail égal, salaire égal entre travailleurs détachés et résidents. Nous regrettons cependant que la droite européenne ait bloqué la proposition des socialistes en faveur d’une Agence européenne des transports routiers, qui est pourtant nécessaire afin de renforcer les contrôles et mieux faire appliquer la législation européenne.
Autre victoire, importante, sur les questions environnementales : la résolution appelle à la mise en place d’une fiscalité environnementale au service d’une mobilité plus propre, notamment à travers la révision de la directive Eurovignette, pour mieux intégrer le principe pollueur payeur dans les coûts des infrastructures routières. Il s’agit là d’être en cohérence avec les objectifs de l’Accord de Paris, que tout nous oblige à mettre en œuvre avec détermination.
Renforcer la dimension sociale des transports routiers n’est pas seulement un enjeu sectoriel mais bien la concrétisation d’une Europe sociale qui protège les travailleurs et les citoyens européens.