Catherine TRAUTMANN accueille avec une grande circonspection la Communication de la Commission européenne en matière de Neutralité du Net, qui pour elle marque un renoncement de Mme Neelie Kroes quant à l’engagement pris lors de son Audition du 14 janvier 2010 (« pas de discrimination sur base commerciale »). A titre d’exemple, un passage en conclusion mentionnant qu’une initiative future « pourrait inclure l’interdiction du blocage de services légaux » laisse même entendre que de tels blocages seraient actuellement autorisés!
« J’avais proposé en novembre dernier lors du Sommet sur la Neutralité, que la Commission mette sur la table une Recommandation, qui dès lors que la possibilité d’un instrument législatif était écarté par certains, me semblait être le véhicule pertinent afin de s’assurer que les nouvelles règles concernant la neutralité inscrites dans le Paquet télécom (dont la période de transposition s’achève le 25 mai) soient appliquées de façon cohérente dans l’Union.
Pour autant il est clair que le débat sur la façon d’assurer une réelle liberté d’accès aux services, contenus et applications ne s’arrête pas à une simple question mercantile.
Alors qu’une liste précise de problèmes (clauses discriminatoires, ralentissements volontaires, voire blocages) a été rapportée à la Commission, sur le fond cette Communication n’apporte aucune réponse.
Pire, elle est d’autant plus décevante qu’elle n’aborde de front aucune des questions qui sont au cœur du débat:
– s’agissant de la qualification de ce qu’est une gestion de trafic « raisonnable », elle se borne à présenter les arguments respectifs;
– sur la question clé de la façon dont elle compte s’assurer que d’éventuels services gérés n’aient pas d’impact négatif sur la qualité de l’internet best effort, elle est muette;
– enfin, elle fait l’impasse sur tout ce qui concerne les rapports d’interconnexion, pourtant conflictuels entre fournisseurs de contenus et opérateurs, et qui mériteraientt à tout le moins l’ébauche d’un débat dans ce cadre!
Par ricochet, on ne s’étonnera donc pas qu’un certain nombre d’initiatives nationales sur le sujet voient le jour: elles seront de fait légitimes voire nécessaires. Mais elles porteront nécessairement un coup à la cohérence du cadre réglementaire européen, et donc au marché unique numérique, dont on avait pourtant cru comprendre qu’il était l’objectif numéro 1 de Mme Kroes, et de toute la Commission. »