Catherine Trautmann (S-D). – Madame la Présidente, Monsieur le Président candidat, autant le dire tout de suite, vous n’avez pas convaincu les socialistes français pendant cinq ans, et vous ne parvenez pas à convaincre avec un projet dans lequel vous êtes aussi généreux dans la parole que général dans le propos.
Comment nous dire « votez pour moi si vous voulez une Europe unie dans sa diversité », alors que c’est justement parce que nous voulons cette Europe que nous préconisions d’attendre le vote des Irlandais pour nous prononcer sur votre candidature?
Fort de l’appui des États membres, vous avez préféré vous faire désigner avec un coup d’avance et moins de risque quant au nombre de suffrages requis. Vous pensiez que le passage devant le Parlement ne serait qu’une formalité: ce n’en est pas une, et ce n’est qu’un début, car votre réponse n’est pas à la hauteur de l’attente des citoyens qui souffrent de la crise et ont marqué leur dépit à l’égard de nos institutions par une faible participation.
Vous dites que la crise vous aurait fait changer et vous vous posez en grand timonier d’une Europe solidaire, mais vous n’avez pas su orienter les États membres vers un plan de relance véritablement européen, et nous attendons toujours les mesures concrètes et contraignantes nécessaires à la régulation financière.
Vous prétendez nous avoir donné des gages sur le social, mais vous ne vous prononcez que pour un nouveau règlement et non pour une révision de la directive « détachement des travailleurs », et vous n’avez pas pris d’engagement ferme, et clair surtout, sur une directive protégeant les services publics.
Vous faites fi de la mémoire des députés. Nous n’avons pas oublié que, durant ces cinq années, les questions sociales n’ont jamais été au cœur des solutions proposées, et c’est seulement maintenant que vous accepteriez une étude d’impact social pour chaque législation européenne?
Dans un contexte de crise sans précédent, qui tue des centaines de milliers d’emplois, il faut tout faire pour ne pas aller vers 25 millions d’Européens chômeurs ou travailleurs pauvres à l’horizon 2010. Il nous faut pour cela une politique industrielle assumée.
Les citoyens ont besoin d’une solidarité exemplaire pour contrer la crise. Ni dans vos propos, ni dans votre ambition affichée pour l’Europe, ils ne trouvent aujourd’hui cette impulsion.
Continuer comme avant, voilà la catastrophe, disait le philosophe Walter Benjamin. Le pas qu’il vous reste à faire vers les socialistes et les sociaux-démocrates est encore bien grand. Par cohérence politique et par respect envers nos électeurs, nous vous refuserons nos voix.